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Fureur française…

Journaliste pour La Presse, Lysiane Gagnon porte un regard mi-amusé mi-désabusé sur les mouvements sociaux qui agitent la France. Dans sa chronique, parue samedi 30 octobre dans les colonnes du quotidien montréalais, elle s’étonne de voir les lycéens manifester. Tout comme elle s’étonne de l’éditorial de Jacques Julliard dans le Nouvel Obs de cette semaine. Morceaux choisis.

> Il y a de quoi rire quand on voit des lycéens hurler: « On veut garder nos pensions ! », et quand des jeunes de 15 ans se font leur propre petit « mai 68 », non pas cette fois pour « changer la vie » mais pour pouvoir, dans... 45 ans, prendre leur retraite à 60 ans ! Heureusement, en France, tout finit par des vacances. Le congé de la Toussaint a fermé les lycées et interrompu la fête.

> Il y a 11 congés fériés en France, tous allongés par le bienheureux mécanisme des « ponts ». On fête même, ô laïcité ouverte !, non seulement la Toussaint, mais la Pentecôte, l'Ascension et l'Assomption. Et c'est sans compter les vacances scolaires, lors desquelles tout le pays ferme boutique chaque fois pendant deux semaines : vacances de la Toussaint, vacances de Noël, vacances d'hiver, vacances de printemps... Cette soif inextinguible de loisirs débouche plus tard sur la retraite à 55 ans, qui est le lot de la plupart des fonctionnaires - un luxe dont la France n'a pas les moyens et une aberration, dans un monde où la retraite est fixée presque partout au-delà de 65 ans.

> Le vent de folie a même contaminé des analystes généralement sensés. Jacques Julliard du Nouvel Observateur accouchait récemment d'une théorie assez stupéfiante ? : constatant l'indéfectible attachement des Français à leurs vacances, leurs congés fériés et leurs retraites prématurées, le chroniqueur affirme que les Français ne sont heureux qu'en dehors du travail. Comme la vie, « la vraie vie », commence à 60 ans, « le report de deux ans de cette seconde naissance, écrit-il, est vécu par les Français comme une véritable agression existentielle contre leur genre de vie et l'idée qu'ils se font du bonheur ».

Ce mode de vie ludique, à l'évidence, mène à la surconsommation, mais en bon homme de gauche, Julliard retourne l'affaire à l'envers et, recyclant une vieille thèse de Marcuse, proclame au contraire que l'avènement de cette civilisation des loisirs dont la France serait l'avant-garde constitue « une défaite sans précédent pour la civilisation industrielle et la société capitaliste ». Pardon ?


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